Archives de l’auteur : Bruno Détrie

Le Conseil d’État consolide les droits d’expression des minorités

Dans une décision du 14 avril 2022, le Conseil d’Etat a clarifié et consolidé les droits d’expression des conseillers élus sur une liste autre que celle ayant obtenu le plus de voix lors du dernier renouvellement du conseil municipal ou ayant déclaré ne pas appartenir à la majorité municipale des élus n’appartenant pas à la majorité municipale. Ainsi, il a tranché la question de l’espace d’expression sur le site internet de la commune.

“Il résulte de l’article L. 2121-27-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT) qu’un espace doit être réservé à l’expression des conseillers n’appartenant pas à la majorité municipale dans toute publication comportant des informations générales sur les réalisations et sur la gestion du conseil municipal, y compris sur le site internet de la commune.”

Une décision qui justifie une relecture attentive du règlement intérieur du conseil municipal et, le cas échéant, sa mise en conformité avec le cadre juridique établi par cet arrêt de la haute juridiction administrative.

De Charybde en Scylla…

Les séquences électorales de ce printemps 2022 ont une nouvelle fois précipité le pays un peu plus profondément dans les abîmes de l’abstention… Sans qu’on soit sûr d’avoir touché le fond, tant la défiance, nourrie de multiples ressorts, est puissante et très enkystée ! Expression d’une démocratie en grande souffrance…

Dans ce marasme, le propos de Frédéric Gilly sous l’égide de la fondation Jean Jaurès offre des propositions intéressantes – voire revigorantes – qu’il faut absolument explorer à tous les échelons, notamment locaux qui, globalement, sont largement à la peine malgré bien des intentions sincères mais non dépourvues de maladresses. La première étant d’abdiquer devant les “sachants”, ces experts des cabinets conseil abondamment, voire excessivement sollicités qui parfois, par leurs méthodes, empêchent l’émergence d’un vrai débat politique qui est la condition première de la restauration d’une confiance entre élus et citoyens…

Identité visuelle : sécuriser le choix, un impératif !

Dans un jugement du 15 novembre dernier, le tribunal administratif de la Martinique a annulé une décision de l’ancien président du conseil exécutif de la collectivité territoriale dotant l’île d’un drapeau et d’un hymne afin qu’elle soit mieux identifiée.

En l’espèce le tribunal a considéré que cette décision prise sans que l’assemblée n’ait adopté une délibération méconnaissait les règles de compétences entre les différents organes de la collectivité (…)” et l’a de ce fait, jugée illégale.

Si ce jugement est une grande première, on ne peut exclure qu’il puisse constituer le maillon fondateur d’une jurisprudence qui soumettrait donc le choix de l’identité visuelle à l’approbation de l’organe délibératif de la collectivité.

Le choix d’une identité visuelle étant toujours un sujet sensible et parfois conflictuel, il paraît raisonnable, au regard de la possible émergence d’un nouveau cadre juridique, de le sécuriser en le soumettant à l’approbation de l’organe délibératif de la collectivité.

Ce qui au-delà de l’officialisation nécessaire aura aussi l’avantage de légitimer ce choix en lui conférant sens et force de la délibération. Ce qui n’est pas anodin. 

Numérique : de l’effet Covid…

Le très volumineux et très documenté “baromètre du numérique 2020” publié récemment sous l’égide de l’Arcep, livre une impressionnante batterie d’indicateurs sur les évolutions des équipements et des usages numériques soumis à l’épreuve du Covid en 2020.

Il pointe des évolutions qui ont été accélérées et amplifiées sous l’effet des confinements successifs* qui ont porté les Français à recourir davantage, et parfois autrement, aux technologies numériques.

Je présente ici une synthèse de ces 348 pages. Continuer la lecture

De l’efficacité des réseaux sociaux de plus en plus incontournables

S’il est un bel exemple de cette efficacité, c’est celui de Thomas Pesquet, l’astronaute, qui depuis l’ISS où il séjourne depuis la fin avril est très actif sur Facebook. Sa page qu’il alimente presque quotidiennement, notamment avec d’époustouflantes photos, connaît une impressionnantes audience : 2,5 millions d’abonnés !

Au-delà de la curiosité et même de la fascination du public pour l’espace, ce succès tient beaucoup à la ligne éditoriale que Thomas Pesquet a choisi autour d’une grille :

  • Sincère et lègère, voire humoristique en partageant dans la simplicité ce qu’il ressent, pense ou vit à 450 km au-dessus de nos têtes.
  • Valorisante à travers l’exploitation de photos de paysages terrestres ou de la station internationale d’un intérêt inédit.
  • Homogène et cohérente à travers un fil invariable qui constitue une véritable chronique.
  • Didactique et très facilement accessible.

En quelque sorte les clés fondamentales de la communication sur les réseaux sociaux.

Incontestablement ce prisme est efficace et sert l’image de l’Agence Spatiale Européenne et du CNES qui bénéficient indirectement de ce registre de communication initié par cet astronaute, communicant hors pair !

 

Copie d’écran de la page Facebook de Thomas Pesquet

Sur le plan de la vitalité démocratique, le résultat du premier tour de ces élections régionales et départementales est un naufrage ! Un naufrage annoncé par une lame de fond qui vient de loin, du fin fond d’une trentaine d’années, au moins…
Les causes de cette abstention sont multiples.

Un naufrage annoncé par une lame de fond qui vient de loin, du fin fond d’une trentaine d’années, au moins

Les causes de cette abstention sont multiples.

Certaines sont conjoncturelles

Ainsi en est-il du report de ces scrutins sur une date particulièrement mal choisie, tout juste au sortir du troisième confinement.

Cette option a de facto rendu quasi impossible toute campagne qui est pourtant une séquence essentielle de préparation du rendez-vous démocratique qui ne peut se résumer au simple dépôt de bulletins dans les urnes, le jour venu.

De même qui pouvait sérieusement ignorer que, renouant à peine avec un semblant de vie normale, les Français ne se passionneraient pas pour ces Élections ?

Au sortir du troisième confinement comment leur en vouloir d’avoir privilégié leur irrépressible envie de souffler, de prendre l’air, de se retrouver entre amis ou en famille et même de souhaiter la fête des pères.

Enfin, dernier paramètre conjoncturel, le regroupement des deux élections sur une même date aura très largement contribué à brouiller les pistes et rendues illisibles les compétences et enjeux propres à chaque collectivité.

Ces erreurs manifestes [2] du Gouvernement, la démocratie les paye cash et chères !

D’autres sont structurelles et très préoccupantes

Préoccupantes en ce qu’elles notifient une fois de plus, mais de manière encore plus massive, le rejet de la politique, tout au moins telle qu’elle est aujourd’hui pratiquée et dans laquelle les Français manifestent silencieusement qu’ils ne s’y reconnaissent pas.

Le niveau de l’abstention témoigne aussi de l’inadéquation entre l’offre politique et la demande citoyenne qui est loin d’être exsangue. Ipsos a mesuré que 39 % des abstentionnistes ont considéré que « ces Élections ne changeront rien à ma vie quotidienne”. Un quart ayant déclaré bouder les urnes « pour manifester leur mécontentement à l’Égard des hommes politiques en général ».

Le fait est : de quoi a-t-on surtout parlé dans cette séquence électorale ? A un an de la présidentielle, essentiellement de jeux politiques et d’alliances baroques. Avec d’évidentes arrière-pensées, la plupart des leaders ayant par ailleurs surtout cherché à nationaliser le scrutin.

Alors on a beaucoup parlé de sécurité qui n’est pas une compétence des Régions ou des Départements ! Continuer la lecture

Régionales et départementales 2021 : vers un déni de démocratie ?   

Au terme d’une très improbable séquence dans laquelle l’improvisation semble avoir été de mise une fois de plus, le Premier ministre a donc annoncé le maintien des élections régionales et départementales au mois de juin tout en les décalant d’une semaine pour, soi disant, prendre en compte les réalités sanitaires. C’est juste pathétique !

De mon point de vue, sur l’échiquier politique, seul le MoDem a défendu haut et clair une position pertinente et cohérente, appelant à un report des élections à l’automne. Juste du bon sens !

La tenue de ces élections dans le contexte que nous connaissons m’apparaît comme double un déni : celui de la réalité de la situation sanitaire qui conduit à un déni de démocratie.
Après l’improbable épisode des élections municipales de 2020, les choix faits pour cette double élection montrent qu’elles ne sont plus qu’une question de sélection de candidats dans un processus démocratique réduit à sa plus simple expression à travers l’organisation d’un vote.

Il se confirme donc que dans l’esprit des pouvoirs publics, l’élection est considérée comme une simple opération technique de désignation d’élus et non comme un processus ayant vocation à incarner la démocratie avec des exigences fortes, rythmées en particulier par le débat d’idées, la confrontation des projets et l’échange avec les citoyens.

Toutes considérations qui auraient, a minima, du conduire à adapter le droit électoral, notamment dans les modalités de campagne et de vote (vote par correspondance, vote par anticipation…). Ce que de très nombreux pays, européens en particulier, qui ont maintenu leurs processus électoraux malgré la pandémie, ont mis en œuvre : Lituanie, Portugal, Espagne, Pays-Bas, Royaume-Uni, Norvège… Les quelques mesurettes annoncées n’y changeront strictement rien.

Dans un contexte de défiance envers “le” politique (institutions et élus), de baisse de la participation électorale, d’effacement des idées et projets, ces élections marquées par l’impossibilité de faire campagne, vont souffrir de sérieuses lacunes démocratiques qui entraîneront à nouveau une très forte abstention qui, n’en doutons pas, sera encore plus élevée que lors des dernières élections municipales ! Entamant aussi la légitimité des instances élues…

Tout cela aboutissant in fine à un nouvel affaiblissement de la démocratie auquel la communication, aussi pertinente soit-elle, ne pourra être d’aucun secours et pas même un soupçon d’antidote. Mais nul doute qu’elle aura bon dos !

Cookies internet : refuser doit être aussi facile que d’accepter         

À partir du 1er avril, tous les sites web français devront être conformes aux nouvelles règles édictées en matière cookies par l’article 5(3) de la directive “ePrivacy” 2002/58/CE modifiée en 2009 et à l’article 82 de la loi Informatique et Libertés qui transpose ces dispositions en droit français.

Les cookies sont des traceurs placés automatiquement dans le navigateur lors de la visite d’un site internet. Certains d’entre eux sont sont indispensables au bon fonctionnement d’un site internet et permettent de simplifier l’interaction site-utilisateur. D’autres, cookies de ciblage marketing, collectent des informations sur l’internaute dans l’objectif de lui adresser de la publicité personnalisée selon les goûts et les centres d’intérêts détectés au fil des navigations. La réglementation vise donc à encadrer cette deuxième catégorie de cookies dans le but d’assurer la protection des données personnelles de l’utilisateur.

Ainsi, l’internaute doit être clairement informé des objectifs de ces cookies et il doit être aussi facile pour lui de les refuser que de les accepter. A partir du 1er avril 2021, tout site doit impérativement et préalablement informer l’internaute de façon claire et synthétique de la nature des cookies. Continuer la lecture

Décrypter la demande de participation citoyenne

Avec ses imperfections, le documentaire “La République de Saillans” (*) diffusé récemment sur LCP pose un regard sur l’expérience de participation citoyenne initiée tout au long du mandat 2014-2020 dans une initiative de l’équipe municipale, aussi courageuse qu’imparfaite, pour redonner du sens à la vie politique de ce village de 1230 habitants planté au bord de la rivière Drôme. Il y est question de démocratie, de citoyenneté, de vote, d’intérêt privé et d’intelligence collective… A travers le point de vue des différents acteurs, il pointe leur fierté de s’être impliqués mais aussi les écueils, les contradictions et les limites de la participation citoyenne.

Si l’expérience qui a mobilisé très largement a fait naître beaucoup d’espoir, elle a aussi généré de la déception, de la lassitude, de l’agacement, des incompréhensions. Et même des frustrations si l’on se réfère aux paroles des habitants desquelles émergent beaucoup d’interrogations sur ce qu’est une “bonne” décision collective entre “consentement“, “consensus mou” et “compromis”.

Au final, les habitants livrent un bilan mitigé. A tel point que lors des dernières élections municipales l’équipe portant cette démarche n’a pas été reconduite, laissant la place à des opposants qui se sont empressés de revenir à une gouvernance académique et qui n’aura pas tardé dans un retour de balancier, comme souvent, à remettre le couvercle sur la marmite démocratique ! Quoi qu’on pense, à coup sûr, un documentaire à voir.

Sans aucun doute la crise sanitaire et son cortège de restrictions de contacts n’auront pas aidé à l’émergence de démarches de participation citoyenne qui était une demande forte exprimée dans les élections municipales de 2020 d’ailleurs assez nettement relayée par les listes en lice. Mais au-delà de ce constat d’évidence, reconnaissons qu’à de rares exceptions près, essentiellement ciblées sur les budgets participatifs, on ne perçoit pas un grand volontarisme des équipes municipales élues à initier des démarches participatives. Soit qu’elles considèrent que les conditions ne sont pas réunies, soit qu’elles sont mobilisées sur d’autres priorités, soit qu’elles se sentent démunies, soit enfin qu’elles en ont peur. Continuer la lecture

Commerce de proximité : le changement c’est maintenant !

Si nous sommes encore loin du bout de cette interminable crise sanitaire, nous savons déjà qu’elle a engendré des ruptures ou des évolutions de fond, notamment dans les modes de consommation.

Les deux confinements ont donné un formidable coup d’accélérateur au commerce en ligne dont il faut bien admettre qu’il a d’abord et surtout profité aux mastodontes (1). Pour autant, faut-il y voir la mort prochaine du commerce de proximité ?

Sans hésitation, NON !
Car toutes les études montrent que l’acte d’achat a profondément évolué en 20 ans. Acheter est de moins en moins un simple geste mercantile, choisir le produit, le payer et l’emporter. Et de plus en plus un acte qui concrétise, souvent de manière complexe, les nouvelles aspirations du consommateur qui cherche à donner du sens à son achat, notamment en faisant de la proximité, un critère de choix  central.

La grande distribution a d’ailleurs bien compris ces évolutions de fond auxquelles elle s’adapte à pas forcés. Ainsi, elle s’installe de plus en plus dans les cœurs de ville. De même considérant que sa croissance est désormais beaucoup tirée par le “bio”, les produits “sains” et locaux, elle a reconfiguré en conséquence son offre et ses linéaires.

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